La pompe dans le diabète de type 2

Par le Pr Michel Pinget, diabétologue 


La pompe à insuline est utilisée de longue date dans le diabète de type 2, à la grande satisfaction de nombreux patients et médecins.

Néanmoins, si l’on examine la place de la pompe à insuline dans le traitement du diabète de type 2 à la lumière de l’evidence based medicine ou médecine fondée sur les preuves, la démonstration de l’intérêt de ce traitement paraissait insuffisante ; en effet seuls 4 essais randomisés avaient comparé pompe et multi­-injections au stylo avec des résultats discordants. Cela explique le fait que dans diverses recommandations internationales sur le traitement du diabète de type 2, il n’y a pas de place pour la pompe à insuline.



Une étude pilote coordonnée par l’équipe de Caen

C’est dire l’intérêt de la publication en juillet 2014, dans la prestigieuse revue britannique The Lancet, des résultats d’un important essai randomisé, plus vaste que les précédents, nommé « OpT2mise ». Cet essai inter­ national multicentrique a été coordonné par un diabétologue français, le Pr Yves Reznik du CHU de Caen.

Cet essai a inclus 331 patients, âgés de 30 à 75 ans, dont l’équilibre glycémique restait imparfait malgré des doses totales élevées d’insuline : l’hémoglobine glyquée était comprise entre 8 et 12 % (en moyenne 9 %) ; les doses d’insuline allaient de 0,7 à 1,8 U/kg/j en moyenne 1,1) ce qui représente en moyenne plus de 100 U/jour chez des patients dont l’IMC moyen était de 33. Ces patients ont été répartis par tirage au sort entre un groupe pompe et un groupe poursuite du traitement par multi-­injections.

Au bout de 6 mois, l’hémoglobine glyquée avait baissé de 1,1 % dans le groupe pompe et de 0,4 % dans l’autre groupe, soit une différence de 0,7 %. Le pourcentage de patients présentant une hémoglobine glyquée inférieure à 8 % était de 55 % dans le groupe pompe et de 28 % dans le groupe multi-­injections. La dose totale d’insuline injectée était de 97 dans le groupe pompe et de 122 dans le groupe multi­-injections.

 

Un enregistrement continu de la glycémie pendant 6 jours, effectué à la fin des 6 mois, montrait une durée moindre des épisodes d’hyperglycémie dans le groupe pompe alors qu’il n’y avait pas de différence pour la durée des épisodes d’hypoglycémie. La prise de poids est restée minime sans différence entre les deux groupes.


Des résultats encourageants

Au total, la pompe à insuline améliore nettement l’équilibre glycémique chez ces patients diabétiques de type 2 mal équilibrés malgré de grosses doses d’insuline et cela, sans majorer le risque d’hypoglycémie et de prise de poids. Ce traitement ne présente pas de contrainte particulière de mise en œuvre en dehors du maniement de la pompe ; ainsi, il n’était pas demandé de comptage des glucides et les patients sous pompe n’effectuaient en moyenne que 3,8 glycémies capillaires par jour ; en outre, il peut être poursuivi avec succès malgré un déficit cognitif modéré.

À quoi est due cette amélioration de l’équilibre glycémique ? Les auteurs avancent deux hypothèses : une absorption plus régulière de l’insuline procurant ainsi une concentration d’insuline basale plus adaptée qu’avec une injection d’insuline lente au stylo et une meilleure observance du traitement de la part de patients plus impliqués.


Pour qui, en pratique ?

Yves Reznik estime à 140 000 le nombre de patients diabétiques de type 2 en France traités par multi injections d’insuline rapide et lente ayant une hémoglobine glyquée supérieure à 8 %. D’où l’importance d’une sélection rigoureuse des bons candidats à ce traitement et de sa prise en charge par l’Assurance maladie.

En France, nous bénéficions d’un système encadré et organisé, respectant la liberté du médecin – diabétologue ou pédiatre – seuls responsables de la prescription et du suivi médical du patient. Ce système repose sur une double expertise : celle de centres initiateurs, structures de diabétologie ou de pédiatrie expérimentées et celle de prestataires de santé à domicile (PSAD), responsables de l’éducation technique, c’est­-à­-dire de l’apprentissage par le patient du maniement de la pompe et du suivi technique à domicile.




Référence : 

Le diabète : Mieux le comprendre pour mieux vivre. Michel Pinget, Michel Gerson. John Libbey Eurotext, 6 janv. 2022.